jeudi 29 novembre 2012

Procès Bino - 6° Patrice Harris : "Les policiers ont modifié mes déclarations"


"Vous vous moquez de la cour !"

Patrice Harris est le demi-frère du boxeur Jean-Marc Mormeck, athlétique, de belle prestance, il est cité à comparaître comme témoin. Ami de Ruddy Alexis, il était, comme Horn, Prudon, Forbin et Zenon avec lui en début de soirée, sur la cité Henri IV, le jour où Jacques Bino a été tué. Il n' a pas fini sa déclaration que le président du tribunal Fagalde l'interrompt, visiblement outré, pour lui demander s'il se moque de la cour. Il reproche vertement au témoin de donner une toute autre version de celle qu'il avait livré aux enquêteurs lorsqu'il a été entendu et menace de le poursuivre pour faux-témoignage ce qui entraîne une vive réaction de la défense : "tous les témoins ont changé de version, et plusieurs fois encore" et de dénoncer la différence de traitement entre Harris et les autres. Le président se ressaisit et entreprend alors de lui lire ses déclarations telles qu'elles ont été enregistrées dans le dossier. Le témoignage est effectivement accablant pour Ruddy Alexis, mais à sa lecture, Harris ne cesse de s'indigner, de s'offusquer, affirmant chaque fois qu'on lui demande s'il reconnait avoir dit ça, qu'on a transformé ses propos, que "les policiers ont rajouté des choses".


Juste un point de détail
En réalité, la version donnée aujourd'hui par le témoin n'est pas si éloignée de celle lue par le président, à un détail prêt, mais de taille : Harris affirme avoir simplement reconnu que le tireur qu'il a vu sur le boulevard Légitimus était de même corpulence que Ruddy. Dans le PV d'audition, cela devient, lorsqu'il parle du tireur : Ruddy était habillé de telle façon, Ruddy a tiré en direction de, etc. Il dit et répète à l'envi que pour cet épisode, il a effectivement parlé d'un tireur, mais sans jamais avoir désigné Ruddy Alexis nommément. On lui montre sa signature et il confirme que c'est bien la sienne, mais avoue avec une certaine gêne : 
"Comme je lis très lentement, les policiers me disaient de signer là." 

De bien curieuses pratiques 
Les avocats de la partie civile lui opposent qu'il n'était pas seul, son avocate l'accompagnait, notamment lorsqu'il a maintenu ses déclarations devant le juge instructeur. Patrice dénonce alors le fait que son avocate, commise d'office, lui réclamait pour continuer à faire son travail, 3200 euros, arguant du fait que le dossier d'instruction était particulièrement dense. Nous qui pensions naïvement que le scandale des dépassement d'honoraire ne concernait que les spécialistes style chirurgien, on découvre avec étonnement que cela pourrait concerner aussi certains avocats commis d'office... Harris affirme avoir plusieurs courriers en sa possession qui confirment ses dires. Le président embarrassé, lui demande de se reconcentrer sur l'affaire et de cesser de parler de Maître Haribo. Harris obtempère, mais les avocats de la défense brandissent un papier figurant au dossier, qui spécifie que lors de l'audition de Patrice Harris par le juge à laquelle la partie civile vient de faire allusion, son avocate a déclaré se sentir mal et a quitté les lieux, laissant donc seul son client. Ils présentent également un autre PV d'audition où déjà Harris se plaint auprès du juge qu'en découvrant certaines de ses déclarations avec cette même avocate, il s'est rendu compte qu'on lui prêtait des propos qui n'étaient pas les siens...


Des méthodes douteuses ?

L'épisode de la providentielle rature le lendemain sur la déclaration de Bernard Nébord (1) viendra encore semer un peu plus le doute sur la façon dont cette enquête a été menée. Dans un autre style, la compagne de Ruddy Alexis, secrétaire de profession, ne pourra contenir ses larmes à la barre lorsqu'elle expliquera les pressions qu'elle a subi, notamment pour modifier selon ses dires, l'heure à laquelle Alexis est rentré ce soir-là. 

(Gladys Rosbeef, compagne de Ruddy Alexis - Photo FG)

 On l'a placée en garde-à-vue, elle et sa fille alors âgée de trois ans ! "On n'a pas cessé de me dire qu'on allait me retirer ma fille, qu'on la placerait à la DDASS, que je suis une mauvaise mère. C'est la capitaine Bonamy qui m'a le plus dit ces choses-là. On m'interrogeait en présence de ma fille, elle ne comprenait pas ce qui se passait, elle demandait "pourquoi vous cherchez mon papa ?"

FRédéric Gircour (chien-creole3.blogspot.com)

  1. A ce propos, lire : La taille, ça compte !



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